Le bien tient à peu de chose, mais n’est pas peu de chose
– Hécaton de Rhodes
Hécaton de Rhodes, philosophe Grec du 1er siècle avant J-C n’aurait sûrement pas pensé être cité un jour sur un site qui traite de la moto. Encore moins n’aurait-il pu savoir ce qu’allait être une moto. Une espèce de cheval à moteur ? Un animal tonitruant, rageur, et qui plonge les quidam croisés dans une torpeur incroyable ? Mais on s’égare…
Jour #14 : de Crète à Rhodes en moto (ou plutôt en bateau)
Mercredi 02 Septembre. Comme je te l’expliquais dans mon dernier article sur la Crète, je suis contraint de remonter sur le continent pour rentrer en Turquie par la frontière terrestre. Ainsi, je m’apprête à me lancer dans une traversée qui me conduira jusqu’à Kavala. Mais avant tout, ma première étape me conduira d’Héraklion (Crète) à Rhodes sur l’île du même nom.
Ainsi, me voilà embarqué dans un ferry qui partira en fin d’après-midi avant de me débarquer à Rhodes vers 5H30 le Jeudi 03 Septembre.
Jour #15 : une colossale réalisation
06H00, la moto est débarquée. J’aperçois au loin une vieille GS, je salue, aucun retour. Plaque allemande. Décidément, dès que les allemands envahissent un territoire étranger ils sont peu aimables. Je suis déçu. Ce n’est pas grave. Après tout, ce voyage reste surtout une aventure pour reconnecter avec moi-même. Je me dis que je ne suis pas douché, j’aimerai bien me doucher. J’attrape l’application « Park 4 night », et je cherche un spot avec douche. Bingo ! Me voici en route vers la baie d’Anthony Quinn. Le 3 Septembre, j’écrirais ces lignes :
Comment te dire que ce matin beaucoup de choses ont commencé à prendre sens. Je tombe sur ce paradis. Personne à ce moment si ce n’est un pêcheur et des poissons qui s’approchent du bord. L’eau est tellement claire, je n’ai pas résisté à me baigner et nager jusqu’au catamaran qui mouille dans cette crique. Quel bonheur… Il y a un côté intemporel et si calme en même temps.
L’occasion de s’interroger sur ce périple, ce que je cherche.
Je ne m’attarderai pas plus longtemps sur ce message car avec ma peau de caucasien, je vire déjà à l’écrevisse sous ce soleil matinal
En sortant de la crique, je profite donc de la douche publique. Bien évidemment, j’utilise un gel douche qui n’est supposé n’avoir aucun impact sur l’environnement. Ce qui est assez important puisque cette eau ira directement dans la mer.
Je poursuis ensuite ma route vers le Sud de l’île, plus précisément Prasonisi. Le lieu est réputé pour le kite-surf, que je ne pratique pas. Mais les photos ont l’air magnifique. Allons-y !
Une fois arrivé sur place, me voici dans le sable. Première fois que je suis en moto dans le sable. Je me souviens alors des conseils avisés que j’ai pu lire ou entendre un peu partout. Ces conseils, d’une rare précision, qui élèvent la conduite sur sable au stade de sciences pointues consistent à simplement tourner la poignée de gaz à fond.
Que de subtilité, n’est-ce pas ? Je me mets en seconde, je tourne la poignée, et progressivement l’embrayage. La GS et ses 400 kilos (en comptant la bagagerie et moi-même) se hisse hors du sable et prend de la vitesse. « Jusqu’ici tout va bien ». Le problème n’est pas la ligne droite, le problème c’est le virage quand à 180° tout au bout pour lequel il va falloir décélérer. Et bah, à peine je décélère, que je finis planté le sable quasiment jusqu’au valise. La conduite sur sable n’est pas chose aisée quand c’est ta première fois. Il y a de nombreuses autres choses à considérer :
- Laisser vivre le guidon
- Rester bien souple au niveau des bras et ne jamais chercher à contraindre ce guidon
- Garder du gaz
- Le regaaaaaaaard !
- Déconnecter un peu le cerveau me semble être un élément important de l’équation aussi.
J’ai quand même réussi à tourner à 90° avant de me planter. Plus qu’à reprendre la même technique. 2nde, gaz, ça sort. Je rejoins rapidement une des paillotes de la plage, car j’ai une réunion en distanciel pour mon boulot. A ce moment là, tu prends à la fois conscience de ta chance, mais aussi de ton malheur. La chance de pouvoir travailler à distance, la malchance de travailler. Non pas que je sois un fainéant, ou que je n’aime pas mon travail. Mais après une nuit de ferry, une baignade dans une magnifique crique, un petit déjeuner très agréable sous le soleil de Rhodes, et des routes dans cette belle région insulaire ainsi que mon expérience de sable, le tout en quelques heures, s’asseoir devant un écran est un dur retour à la réalité.
Le soir, j’irais dormir du côté de Kiotari au son des vagues. Je profiterai aussi de la chaleur pour faire un peu de lessive – à la main – et laisser le tout sécher.
Jour #16 : infiltration (involontaire) en terrain militaire
Vendredi 04 Septembre. Au petit matin, et après une bonne nuit reposante, je repars direction le Nord. J’avais repéré une ancienne piste d’atterrissage qui plongeait dans la mer. Un spot plutôt sympa pour faire des prises de vue en drone.
Je prends la route bitumée, et arrivé au niveau de cette piste, cherche un chemin pour rejoindre la piste. Chose faite. Me voici sur la piste, je fais quelques tours de l’endroit, il y aurait quoi organiser des runs démentiels ici malgré le bitume vieillissant. Je repère sur le sol un marquage pour l’atterrissage d’un hélicoptère. Je me dis que cela sera le point central pour faire partir le drone.
Je descends, commence à sortir le drone, puis je commence à suspecter que je ne suis peut-être pas au bon endroit. Je te laisse visionner la vidéo et me donner ton avis.
L’été et l’automne 2020 seront des périodes de tensions entre la Turquie et la Grèce. La multiplicité des provocations de l’un envers l’autre amène l’armée Grecque à augmenter sa fréquence d’exercices militaires. Et devine qui se retrouve justement sur un terrain d’entraînement ?
Le 4×4 que tu vois bouger à la fin de la vidéo me rejoindra puis m’interrogera sur mes intentions, comment je suis arrivé, si mon drone filme. J’expliquerai qu’il n’y avait aucun panneau par là où je suis passé, et je m’excuserai bien évidemment. Après un petit moment, je serais au final « libéré » pour reprendre ma route et tracer vers mon ferry.
Arrivé sur Rhodes, je m’arrêterai à une station service faire le plein avant d’embarquer dans le ferry de 16 heures. J’y retrouverai alors la vieille GS 1150 de 1998 immatriculée en Allemagne que j’avais aperçu à ma descente du ferry la veille. Le motard me salue, puis vient me parler. Il s’appelle Franck. C’est un sacré personnage, mais je préfère t’en parler dans un prochain article car nous allons rouler ensemble jusqu’au 07 Septembre et Franck va être à l’origine de beaucoup de mes destinations en Turquie notamment. Place au ferry qui doit nous amener de Rhodes à l’île de Patmos où nous devons débarquer vers 1 heure du matin.