Samedi 29 Août 2020, le grand jour ! Je suis comme un gamin à Noël. Excité par l’idée du changement de mes pneus pour enfin avoir des vrais pneus d’offroad, en outre des Michelin Anakee Wild. Rendez-vous à Heraklion, à l’atelier dont je t’ai parlé dans cet article. Dès que les pneus seraient montés, je tracerai vers le Sud. J’ai déjà repéré sur l’application Wikiloc un itinéraire emprunté par un raid KTM (accessible ici). Si les autrichiens ont pu le faire, alors les allemands aussi.
Quand je pars d’Heraklion, je pense qu’il est 10H. Il fait déjà chaud, les températures devraient grimper à 40°C dans la journée. La bonne nouvelle, c’est que l’itinéraire passe par Tsoutsouros où j’étais hier (un pur hasard). Du coup, je trace par la route. Première fois avec des pneus à crampon, c’est étrange, pas super agréable. Mais bon, ça s’apprivoise puis de toute façon je ne les ai pas pris pour se limer sur le bitume mais bien pour tracter en-dehors des routes.
Nous voici donc arrivés à Tsoutsouros. On démarre la section offroad par une belle montée avec des pierres qui doivent se décrocher au passage de chaque pick-up de berger. 100 mètres, première chute. C’est pas grave, je m’étais préparé mentalement depuis le début à tomber. Je ne cessais de me répéter depuis plusieurs semaines que la chute ne serait pas un drame puisqu’elle était de toute façon inévitable. Moto à terre, on se baisse, on la relève. Ne te presse pas à la relever, prends le temps de souffler, puis de la remonter avec la bonne technique. Même sans bagagerie, avec mon réservoir quasiment plein, je dois m’approcher des 268 kilos, et je risque de ne pas avoir à la relever qu’une seule fois, donc mieux vaut éviter le blocage du dos.
Avec le recul, quand je regarde les deux vidéos de ma GoPro, les pistes sont larges, et pourtant je me traîne. Comparé aux 80km/h que je vais réussir à tenir sur certaines pistes en Turquie, ces chemins Crétois pourtant large sont mes premiers tours de roue loin de l’asphalte.
Chaque virage sur les vidéos ci-dessous en témoigneront. Bien sûr, je n’ai aucun entraînement pour rouler en offroad, aucun stage de formation, aucune première expérience. J’ai regardé 3 vidéos sur Youtube avant de me dire que ça ne servirait à rien et que j’improviserai. Je suis bon en improvisation, et je déteste faire demi-tour, donc d’une certaine façon je ne me laissais pas le choix.
Excuse-moi pour la qualité mais les images ont été faites avec la H+, donc pas de qualité exceptionnelle. Assez bêtement, je n’ai pas pensé à prendre le câble pour la recharger, ni même penser à vérifier qu’elle était à 100% en partant le matin. Du coup, ce sont les deux seules vidéos de GoPro que j’ai de cette journée. Mais ne t’inquiète pas, j’ai de la photo et du drone 🙂
On continue, ça monte, ça descend. En montée j’arrive à attraper les 30km/h, en descente en revanche je divise par 2 (quand je relis ces nombres en 2022, clairement j’ai progressé. Mais il faut bien débuter à un moment). Je déteste les descentes. Les pentes sont abruptes, le poids de la GS est sur l’avant, elle t’entraine vers le bas. Ceci est d’autant plus éprouvant quand tu n’as aucune expérience et que tu te crispes. Ma montre connectée pensera que je suis entrain de faire un marathon en sprint poursuivi par des piranhas car je resterai à un rythme cardiaque très haut pendant quelques heures.
Je vais alors arriver à cet endroit avec un magnifique point de vue sur la mer et en contrebas ce qui doit être le village de Trik Ekklisies. Je n’ai alors croisé personne si ce n’est quelques chèvres sur la route. Face à la beauté de ce paysage, et ce sentiment de grandeur dans des paysages arides et inhospitaliers, je me prends à rêver.
T’y aurais pensé toi ?
Première fois en offroad.
Première fois sur les pistes Crétoises.
Un soleil de plomb.
Pas de vent.
40°C.
Plus d’eau…
Tu m’as bien lu. Plus d’eau, gourde vide. Pas d’eau, pas de points d’eau. Je profite de m’être arrêté pour essayer de négocier avec quelques chèvres, mais ce sera sans succès. Au milieu de nul part, sans internet, aucun village ne semble accessible à moins de s’embarquer dans un périple qui semble aussi compliqué que revenir sur mes traces. Mais je ne reviendrai pas sur mes traces. Je n’aime pas ça. Dans ce moment de souffrance, les contrastes du paysage qui s’offrent à moi m’apparaissent magnifiques.
Je n’ai de toute façon pas le choix. J’ai faim, j’ai soif, il faut que j’avance. Je sais que mon itinéraire doit me faire redescendre vers les plages de la façade Sud. Il faut que je m’accroche, il y aura forcément des plagistes là-bàs bien que le tourisme ne soit pas très présent cette année en raison de la Covid. Je reprendrai donc les pistes. C’est alors que j’aurais pu me croire dans un livre de Tolkien quand je découvre ce défilé.
En rentrant dans le défilé, je découvrirai des câbles électriques. Ce qui veut dire qu’il y a des lieux de vie pas loin. Bonne réponse ! A ma grande surprise, en quittant ce défilé, je tombe sur la baie de Trypiti dans laquelle je trouverai un restaurant où je descendrai 2 litres d’eau en 5 minutes et lui achèterai une autre bouteille de la même contenance pour la suite de mon trajet. J’en profiterai pour y déjeuner, je ferai essayer le drone aux enfants, et je trouverai que les 3 chatons entrain de se battre pour savoir lequel allait voler dans mon assiette étaient beaucoup trop énergiques pour moi.
Pas de réseau ici. Je ne découvre qu’aujourd’hui en écrivant ces lignes qu’il y a des ruines Minoenne à proximité. Vestige d’une civilisation qui va me suivre jusqu’au Sud-Ouest de la Turquie.
La suite de l’itinéraire se fera tranquillement. En fait, il ne restera plus beaucoup de pistes. Je dormirai le soir d’un sommeil bien mérité et je tirerai le lendemain les premières conclusions (et courbatures) de l’offroad. Effectivement, sortir des routes et parcourir les chemins permet de découvrir des lieux magiques et offrir des paysages aux contrastes époustouflant. Je ferais aussi attention à mes réserves d’eau pour les prochaines sessions.